dimanche 10 novembre 2013

Trouvailles de Dieu

- Évangile selon Luc, chap 15, 1 à 10 -

Chers amis,

Nous vivons dans une culture spirituelle de chercheurs : dans les différentes religions, on nous dit qu’il s’agit de se mettre en route, de se dépasser, se transcender, pour accéder à la sphère du sacré, au monde de Dieu. On nous dit qu’il s’agit de devenir chercheurs de Dieu. Cherchez Dieu, et avec la bonne technique, vous le trouverez ! Voilà le slogan des religions.


Est-ce parce que le mouvement intérieur de l’homme scientifique, qui se construit par l’exploration en vue de la maîtrise de la nature, du corps, de l’espace, que l’attitude en face de Dieu devient ainsi une attitude de chercheur ? Que la spiritualité est en fin de compte une question de technique ? Technique de méditation, d’apaisement intérieur, d’apprentissage des bons gestes de bénédiction.

Donc, que je veuille ou non, j’évolue dans ce contexte de chercheurs de Dieu, et ma disposition intérieure, en arrivant au temple (ou d’ailleurs à l’Église) est celle-là : JE vais y trouver quelque chose. JE vais chercher, et JE CROIS et donc JE trouverai Dieu.

Par corrélation toute logique, face à cette attitude de chercheur que je communique au monde, les autres, ceux qui ne viennent pas au temple, se posent en anti-chercheurs. L’un qui va dire : JE n’ai pas besoin de chercher Dieu, je l’ai déjà trouvé, dans le coucher du soleil etc. L’autre qui va dire : JE ne cherche pas Dieu, parce que je crois savoir qu’il n’existe pas (c’est aussi une façon de croire). 

Et c’est comme ça que nous nous retrouvons, les chercheurs de Dieu protestants au culte, les chercheurs de Dieu catholiques à la messe, les chercheurs de Dieu privatifs devant leurs télés, et les ivrognes dans les bars. Nous formons des réseaux de chercheurs qui, parfois, s’opposent, parfois concluent des accords, et pour la plupart du temps s’ignorent.

Or, d'après Jésus, nos réseaux de chercheurs apparentés ressemblent davantage à des filets, avec leurs mailles qui servent à capturer, des chaînons qui isolent et nous enferment dans des « cercles ». La société dont Jésus rêve fonctionne autrement : chacun y trouve sa place indépendamment de ses origines, son carnet d’adresses, son éducation, sa religion.

C’est d’ailleurs aussi vrai dans l’Église protestante : ô combien nous nous enfermons mutuellement dans ces « réseaux » qui sont des filets étouffants pour Jésus : les protestants de souche, les vrais convertis, les anciens catholiques, les chrétiens sociologiques, les curieux de passage et que sais-je encore. C’est là que ce verset si dur fait carrément du bien : Si quelqu'un vient à moi et ne déteste pas ses parents, c.-à-d., ces classifications, ces chaînes du passé, il ne peut être mon disciple.

La parabole du mouton perdu et retrouvé et la parabole de la drachme perdue et retrouvée nous invitent à penser, à repenser la radicalité de l’ouverture que Jésus introduit dans notre vie spirituelle. Cette radicalité se récapitule ainsi : Nous ne sommes pas des chercheurs de Dieu, nous sommes ses trouvailles! Le sens de notre présence dans cette église est ainsi résumé : ensemble, laissons-nous trouver par Dieu.

Ce programme spirituel de Jésus, annoncé dans la parabole, est sans doute en décalage par rapport à nos attentes, à notre culture religieuse, à la tradition locale : néanmoins, c’est par cette ouverture radicale que l’Évangile devient Royaume des cieux. Ensemble, laissons-nous trouver par Dieu : C’est à recommencer tous les dimanches, comme la foi n’est jamais un acquis de notre spiritualité et de ses techniques, si bienfaisantes soient-elles.

Et c’est dans ce sens que nous pouvons dire : notre culte, les bénédictions, ainsi que la Sainte Cène, sont ouverts à tous. Toute personne, avec ses différences et ses convictions, y est accueillie sans condition préalable pour y trouver sa place.

Notre culte est destiné à être, à devenir un temps de ressourcement "ouvert au public" où résonnent des mots spirituels, insolites, comme 'grâce', 'louange', 'résurrection', 'bénédiction' : des mots qui peuvent se conjuguer, de façon inattendue, comme depuis les origines de la foi chrétienne et seulement dans le coeur de l'auditeur, en une unique 'Parole' venant de Dieu. Parole qui réconfortera les uns et interpellera les autres, donnant à chacun l'occasion de progresser et de (re)construire la mémoire et le projet de sa vie.

Parce que nous ne sommes pas des chercheurs de Dieu, mais ses trouvailles, la Bible, la foi et l’Église deviennent pour nous des lieux d’inspiration : Ressentir le souffle créateur donne des idées pour la vie : l’intuition qui se révèle ainsi nous fait saisir le sens de l’existence.

Parce que nous ne sommes pas des chercheurs de Dieu, mais ses trouvailles, la Bible, la foi et l’Église deviennent pour nous des sources de créativité : À notre époque, l’humanité a besoin d’innover sans occulter les fondations de la vie. La foi est source d’une fraîcheur qui permet d’imaginer un avenir et de réformer sans cesse le présent, réconcilié avec le passé.

Parce que nous ne sommes pas des chercheurs de Dieu, mais ses trouvailles, la Bible, la foi et l’Église deviennent pour nous des occasions d’approfondissement : la méditation, le partage fraternel et l’étude éclairée des textes bibliques sont au coeur de notre réflexion. Ils éveillent notre conscience et aiguisent la curiosité pour tout ce que la vie nous réserve.
Parce que nous ne sommes pas des chercheurs de Dieu, mais ses trouvailles !

Parce que nous ne sommes pas des chercheurs de Dieu, mais ses trouvailles, la Bible, la foi et l’Église deviennent pour nous des repères pour la vie : Nous gagnons en liberté grâce à la libération dont la foi nous investit : l’orientation par la Bible nous aide. Elle donne des repères qui prennent en compte l’histoire et la situation personnelles de chacun. Elle nous envoie vers ceux qui ont besoin de nous. Amen.